Juliette Weiss
L'apogée du StreetWear

Longtemps réservée à une minorité, mal
considérée, voire complètement reniée
par l’industrie de la mode, la tendance streetwear est désormais un incontour-
nable.
PAR JULIETTE WIESS
Logos, sneakers, sacs bananes.... Sur les déflés, le constat est le même : la mode est défniti-
vement dans la rue. Et cette rue en question semble avoir des codes identiques que l’on soit à
New York, Paris ou Londres. Alors, changement d’époque, pression commerciale ou simple
revival tendance ?
Tout semble avoir commencé avec Demna Gvasalia ou encore Gosha Rubchinskiy. Des
marques émergentes, dirigées par des inconnus, qui réinventent les codes actuels de la
mode. Ca sonne bien, et ça marche. Déflés dans des lieux improbables, mélange de reven-
dication politique, d’inspiration pop culture, les cartes sont redistribuées. Aujourd’hui ils
ne sont plus seuls et on voit feurir des marques à L’ADN street revendiqué. Etudes, GmbH ,
Andrea Crews... Un style recherché et fonctionnel, puisant aussi bien son inspiration dans la
« young culture » que chez les grands designers.
À grands coups de plans marketing et d’égéries millennial aux millions de followers, la ten-
dance « contreculture » explose. Et le dernier « mercato fashion » nous le confrme.
Louis Vuitton, feuron du luxe et de la tradition française, nomme à la tête de ses collections
hommes Virgil Abloh. DJ, conseiller artistique de Kanye West, et surtout créateur de OFF
WHITE, marque streetwear par excellence. Les fux créatifs ne sont plus à sens unique et les
frontières de la mode ne semblent plus nécessaires.
Autre domaine où cette tendance est devenue reine : les prestigieux concours de mode. Cette
année, pour caresser l’espoir d’être retenu (ou au moins de faire parler de soi) il fallait indé-
niablement surfer sur le streetwear et/ou le No-Gender.
Un changement d’époque portant avec lui une volonté profonde de renouveau. L’identité
individuelle, sociale et sexuelle est en perpétuelle évolution et la mode l’a bien compris.
Cependant un doute persiste : À force de voir des collections similaires et où chacun essaie
d’être le plus transgressif possible, sans que cela s’inscrive forcement dans un processus de
création, on a l’impression d’assister à une apologie du néant. Le chic et l’élégance ne font
plus vendre. Yeezy et hoodie, plutôt que high heels et tailleur. Ne pas suivre les codes établis
de l’industrie, les détourner, rejeter le fast retail, jouer sur les codes de la pop culture, pour-
quoi pas !
Cependant le malaise survient lorsque cette tendance devient « la vache à lait » de beaucoup
de marques de luxe. On se retrouve alors rattrapé par le système. Difcile de prôner la réalité
quand on met en vente un maillot de foot monogrammé à 600 euros.
Lorsque Delphine Arnault, initiatrice du prix LVMH, en évoquant le fameux concours de
mode, afrme qu’au delà du concept, il est important que la marque ait déjà un réel aspect
commercial. Une dissidence quelque peu hypocrite.
« Il ne s’agit pas de créer un conte de fée, ce n’est pas la réalité », déclarait Demna Gvasalia à
B.O.F au sujet de ses collections. En espérant que cette sincérité perdure et ne soit pas sim-
plement un caprice artistique et commercial.